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La psychanalyse, disait Dolto, c'est apporter à chaque séance un message inconnu de soi-même et qu'un autre perçoit parce qu'il est payé pour y être attentif et pour se projeter le moins possible. C'est une aventure revécue de sa propre vie. Rares sont aujourd'hui encore ceux qui connaissent les bienfaits véritables de cette technique d'utilité publique inventée par Freud. Aussi remarquable que subversive, cette pratique profondément éthique se détermine d'un lien social à deux inédit et permet à celui qui en bénéficie - enfant, adolescent ou adulte - de retrouver dans le parler ce qu'il lui faut de jouissance, de courage et de détermination pour que son histoire continue. Elle révolutionne de surcroît son rapport à lui-même, aux autres et au monde. Bienvenue. Cécile Crignon

Il n'y a pas de rapport sexuel

Il n'y a pas de rapport sexuel

- Il n'y a pas de rapport sexuel parce que la jouissance de l'Autre prise comme corps est toujours inadéquate - perverse d'un côté, en tant que l'Autre se réduit à l'objet a - et de l'autre, je dirai folle, énigmatique.

N'est ce pas de l'affrontement à cette impasse, à cette impossibilité d'où se définit un réel, qu'est mis à l'épreuve l'amour?

Du partenaire, l'amour ne peut réaliser que ce que j'ai appelé par une sorte de poésie, pour me faire entendre, le courage, au regard de ce destin fatal. Mais est-ce bien de courage qu'il s'agit ou des chemins d'une reconnaissance? Cette reconnaissance n'est rien d'autre que la façon dont le rapport dit sexuel - devenu là rapport de sujet à sujet, sujet en tant qu'il n'est que l'effet du savoir inconscient - cesse de ne pas s'écrire.

" Cesser de ne pas s'écrire ", ce n'est pas là formule avancée au hasard. Je l'ai référée à la contingence, tandis que je me suis complu au nécessaire comme à ce qui " ne cesse pas de s'écrire ", car le nécessaire n'est pas le réel. Relevons au passage que le déplacement de cette négation nous pose la question de ce qu'il en est de la négation quand elle vient prendre la place d'une inexistence.

D'autre part, j'ai défini le rapport sexuel comme ce qui " ne cesse pas de ne pas s'écrire". Il y a là une impossibilité. C'est aussi bien que rien ne peut le dire - il n'y a a pas, dans le dire, d'existence du rapport sexuel.

[...] La contingence, je l'ai incarné du " cesse de ne pas s'écrire ". Car il y a là rien d'autre que rencontre, la rencontre chez le partenaire des symptômes, des affects, de tout ce qui chez chacun marque la trace de son exil, non comme sujet mais comme parlant, de son exil du rapport sexuel.

N'est-ce pas dire que c'est seulement par l'affect qui résulte de cette béance que quelque chose se rencontre, qui peut varier infiniment quant au niveau du savoir, mais qui, un instant, donne l'illusion que le rapport sexuel cesse de ne pas s'écrire? - illusion que quelque chose non seulement s'articule mais s'inscrit, s'inscrit dans la destinée de chacun, par quoi, pendant un temps, un temps de suspension, ce qui serait le rapport sexuel trouve chez l'être qui parle sa trace et sa voie de mirage.


Le déplacement de la négation du " cesse de ne pas s'écrire " au " ne cesse pas de s'écrire ", de la contingence à la nécessité, c'est là le point de suspension à quoi s'attache tout amour.

Tout amour, de ne subsister que du " cesse de ne pas s'écrire ", tend à faire passer la négation au " ne cesse pas de s"écrire ", ne cesse pas, ne cessera pas. Tel est le substitut qui - par la voie de l'existence, non pas du rapport sexuel, mais de l'inconscient, qui en diffère - fait la destinée et aussi le drame de l'amour.

( Lacan, Encore, Seuil, 1975, p 182-184 )

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